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Jean Bart Fin et suite |
Le chant du Maquisard
On a sans doute trop présenté Jean Bart comme une sensibilité
autarcique, terrée dans son camp retranché : l'image, à force, sent désagrèablement
le renfermé. Elle dessert un homme qui n'a de cesse de transcrire ce qui le meut et
l'empoigne, et qui a toujours placé ses exigences au service de ses sens. Moins
dépouillé qu'Il le faut - retour discret des machines, rythmes plus appuyés -,
Fin et suite affiche cette rigueur musicale qui n'hypothèque jamais le plaisir
et les modulations.
On y joue toujours admirablement de la guitare, mais aussi
du banjo, du violoncelle, de la boite d'allumettes, du vélo, on refuse toujours les
harmonies standard, les accords à l'amiable. Ce qui permet à Jean Bart de mener ensuite
son disque jusqu'au bout de son art : cette manière unique de travailler la matière
d'une réalité éclairée, de la découper, de la recomposer, d'íntégrer voix, sons,
citations, sans forberie, sans ruses, avec une minutie de tous les instants. Juste pour se
retrouver, en fin de compte, entier, original.
Pas étonnant que ce disque se nourrisse de Jules et Jim et des Deux
Anglaises et le Continent, où Truffaut lui-même se mettait à nu à travers les
mots d'Henri-Pierre Roché et la voix de ses acteurs. Pas étonnant qu'il se rapproche une
nouvelle fois de la puissance d'expression du cinéma.Sauf que le cinéma de Jean Bart
échappera toujours à l'enfermement des images, à leur magie piégeuse. |
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Il faudrait peut-être prendre Fin et Suite comme un documentaire
- sujet principal : les sentiments - qui ne mépriserait pas l'esthétique et refuserait
les procédés. Qui, grâce à la complicité des mots d'Yves Sarda, se donne la chance
d'exprimer avec une rare justesse l'amour qui part en lambeaux (Lise), la passion
qui se débat parce qu'elle ne trouve pas d'écho (Peine perdue), tous ces
malheurs trés simples qui ont le don d'entraîner des émotions compliquées - et des
sourires, parfois.
On se prend alors à dire que Jean Bart a franchi une ligne - comme lorsque l'on passe "du
côté de ceux qui sont tombés dans l'amour! Et qu'il n'y a pas moyen de revenir" .
Une ligne qui sépare les zones de l'arrière et le front, la tentation de tricher et le
désir d'être soi-même. A écouter Fin et suite, on sent bien que le Genevois a rejoint
à tout jamais le maquis, qu'il en explorera tous les recoins et qu'il n'en sortira pas.
Richard Robert (Inrocks, avril 95)
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